PostgreSQLLa base de données la plus sophistiquée au monde.

5.3. Contraintes

Les types de données sont un moyen de restreindre la nature des données qui peuvent être stockées dans une table. Pour beaucoup d'applications, toutefois, la contrainte fournie par ce biais est trop grossière. Par exemple, une colonne qui contient le prix d'un produit ne doit accepter que des valeurs positives. Mais il n'existe pas de type de données standard qui n'accepte que des valeurs positives. Un autre problème peut provenir de la volonté de contraindre les données d'une colonne par rapport aux autres colonnes ou lignes. Par exemple, dans une table contenant des informations de produit, il ne peut y avoir qu'une ligne par numéro de produit.

Pour cela, SQL permet de définir des contraintes sur les colonnes et les tables. Les contraintes donnent autant de contrôle sur les données des tables qu'un utilisateur peut le souhaiter. Si un utilisateur tente de stocker des données dans une colonne en violation d'une contrainte, une erreur est levée. Cela s'applique même si la valeur vient de la définition de la valeur par défaut.

5.3.1. Contraintes de vérification

La contrainte de vérification est la contrainte la plus générique qui soit. Elle permet d'indiquer que la valeur d'une colonne particulière doit satisfaire une expression booléenne (valeur de vérité). Par exemple, pour obliger les prix des produits à être positifs, on peut utiliser :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric CHECK (prix > 0)
);

La définition de contrainte vient après le type de données, comme pour les définitions de valeur par défaut. Les valeurs par défaut et les contraintes peuvent être données dans n'importe quel ordre. Une contrainte de vérification s'utilise avec le mot clé CHECK suivi d'une expression entre parenthèses. L'expression de la contrainte implique habituellement la colonne à laquelle elle s'applique, la contrainte n'ayant dans le cas contraire que peu de sens.

la contrainte peut prendre un nom distinct. Cela clarifie les messages d'erreur et permet de faire référence à la contrainte lorsqu'elle doit être modifiée. La syntaxe est :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric CONSTRAINT prix_positif CHECK (prix > 0)
);

Pour indiquer une contrainte nommée, on utilise le mot-clé CONSTRAINT suivi d'un identifiant et de la définition de la contrainte (si aucun nom n'est précisé, le système en choisit un).

Une contrainte de vérification peut aussi faire référence à plusieurs colonnes. Dans le cas d'un produit, on peut vouloir stocker le prix normal et un prix réduit en s'assurant que le prix réduit soit bien inférieur au prix normal.

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric CHECK (prix > 0),
    prix_promotion numeric CHECK (prix_promotion > 0),
    CHECK (prix > prix_promotion)
);

Si les deux premières contraintes n'offrent pas de nouveauté, la troisième utilise une nouvelle syntaxe. Elle n'est pas attachée à une colonne particulière mais apparaît comme un élément distinct dans la liste des colonnes. Les définitions de colonnes et ces définitions de contraintes peuvent être définies dans un ordre quelconque.

Les deux premières contraintes sont appelées contraintes de colonne tandis que la troisième est appelée contrainte de table parce qu'elle est écrite séparément d'une définition de colonne particulière. Les contraintes de colonne peuvent être écrites comme des contraintes de table, mais l'inverse n'est pas forcément possible puisqu'une contrainte de colonne est supposée ne faire référence qu'à la colonne à laquelle elle est attachée (PostgreSQL™ ne vérifie pas cette règle mais il est préférable de la suivre pour s'assurer que les définitions de tables fonctionnent avec d'autres systèmes de bases de données). L'exemple ci-dessus peut aussi s'écrire :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric,
    CHECK (prix > 0),
    prix_promotion numeric,
    CHECK (prix_promotion > 0),
    CHECK (prix > prix_promotion)
);

ou même :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric CHECK (prix > 0),
    prix_promotion numeric,
    CHECK (prix_promotion > 0 AND prix > prix_promotion)
);

C'est une question de goût.

Les contraintes de table peuvent être nommées, tout comme les contraintes de colonne :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric,
    CHECK (prix > 0),
    prix_promotion numeric,
    CHECK (prix_promotion > 0),
    CONSTRAINT promo_valide CHECK (prix > prix_promotion)
);

Une contrainte de vérification est satisfaite si l'expression est évaluée vraie ou NULL. Puisque la plupart des expressions sont évaluées NULL si l'une des opérandes est nulle, elles n'interdisent pas les valeurs NULL dans les colonnes contraintes. Pour s'assurer qu'une colonne ne contient pas de valeurs NULL, la contrainte NOT NULL décrite dans la section suivante peut être utilisée.

5.3.2. Contraintes de non nullité (NOT NULL)

Une contrainte NOT NULL indique simplement qu'une colonne ne peut pas prendre la valeur NULL. Par exemple :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer NOT NULL,
    nom text NOT NULL,
    prix numeric
);

Une contrainte NOT NULL est toujours écrite comme une contrainte de colonne. Elle est fonctionnellement équivalente à la création d'une contrainte de vérification CHECK (nom_colonne IS NOT NULL). Toutefois, dans PostgreSQL™, il est plus efficace de créer explicitement une contrainte NOT NULL. L'inconvénient est que les contraintes de non-nullité ainsi créées ne peuvent pas être explicitement nommées.

Une colonne peut évidemment avoir plusieurs contraintes. Il suffit d'écrire les contraintes les unes après les autres :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer NOT NULL,
    nom text NOT NULL,
    prix numeric NOT NULL CHECK (prix > 0)
);

L'ordre n'a aucune importance. Il ne détermine pas l'ordre de vérification des contraintes.

La contrainte NOT NULL a un contraire ; la contrainte NULL. Elle ne signifie pas que la colonne doit être NULL, ce qui est assurément inutile, mais sélectionne le comportement par défaut, à savoir que la colonne peut être NULL. La contrainte NULL n'est pas présente dans le standard SQL et ne doit pas être utilisée dans des applications portables (elle n'a été ajoutée dans PostgreSQL™ que pour assurer la compatibilité avec d'autres bases de données). Certains utilisateurs l'apprécient néanmoins car elle permet de basculer aisément d'une contrainte à l'autre dans un fichier de script. On peut, par exemple, commencer avec :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer NULL,
    nom text NULL,
    prix numeric NULL
);

puis insérer le mot-clé NOT en fonction des besoins.

[Astuce]

Astuce

Dans la plupart des bases de données, il est préférable que la majorité des colonnes soient marquées NOT NULL.

5.3.3. Contraintes d'unicité

Les contraintes d'unicité garantissent l'unicité des données contenues dans une colonne ou un groupe de colonnes par rapport à toutes les lignes de la table. La syntaxe est :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer UNIQUE,
    nom text,
    prix numeric
);

lorsque la contrainte est écrite comme contrainte de colonne et :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer,
    nom text,
    prix numeric,
    UNIQUE (no_produit)
);

lorsqu'elle est écrite comme contrainte de table.

Lorsqu'une contrainte d'unicité fait référence à un groupe de colonnes, celles-ci sont listées séparées par des virgules :

CREATE TABLE exemple (
    a integer,
    b integer,
    c integer,
    UNIQUE (a, c)
);

Cela précise que la combinaison de valeurs dans les colonnes indiquées est unique sur toute la table. Sur une colonne prise isolément ce n'est pas nécessairement le cas (et habituellement cela ne l'est pas).

Une contrainte d'unicité peut être nommée, de la façon habituelle :

CREATE TABLE produits (
    no_produit integer CONSTRAINT doit_etre_different UNIQUE,
    nom text,
    prix numeric
);

En général, une contrainte d'unicité est violée lorsqu'au moins deux lignes de la table possèdent des valeurs identiques sur toutes les colonnes de la contrainte. En revanche, deux valeurs NULL ne sont pas considérées égales. Cela signifie qu'il est possible de stocker des lignes dupliquées contenant une valeur NULL dans au moins une des colonnes contraintes. Ce comportement est conforme au standard SQL, mais d'autres bases SQL n'appliquent pas cette règle. Il est donc préférable d'être prudent lors du développement d'applications portables.

5.3.4. Clés primaires

Techniquement, une contrainte de clé primaire n'est que la combinaison d'une contrainte d'unicité et d'une contrainte NOT NULL. Les définitions de table suivantes acceptent de ce fait les mêmes données :

CREATE TABLE produits (
        no_produit integer UNIQUE NOT NULL,
        nom text,
        prix numeric
    );
CREATE TABLE produits (
        no_produit integer PRIMARY KEY,
        nom text,
        prix numeric
    );

Les clés primaires peuvent également contraindre plusieurs colonnes ; la syntaxe est semblable aux contraintes d'unicité :

CREATE TABLE exemple (
        a integer,
        b integer,
        c integer,
        PRIMARY KEY (a, c)
    );

Une clé primaire indique qu'une colonne ou un groupe de colonnes peut être utilisé(e) comme identifiant unique des lignes de la table. (C'est une conséquence directe de la définition d'une clé primaire. Une contrainte d'unicité ne suffit pas à fournir un identifiant unique car elle n'exclut pas les valeurs NULL). Ceci est utile à la fois pour des raisons documentaires et pour les applications clientes. Par exemple, une application graphique qui permet de modifier les valeurs de lignes a probablement besoin de connaître la clé primaire d'une table pour pouvoir identifier les lignes de manière unique.

Une table a, au plus, une clé primaire. (Le nombre de contraintes UNIQUE NOT NULL, qui assurent la même fonction, n'est pas limité, mais une seule peut être identifiée comme clé primaire.) La théorie des bases de données relationnelles impose que chaque table ait une clé primaire. Cette règle n'est pas forcée par PostgreSQL™, mais il est préférable de la respecter.

5.3.5. Clés étrangères

Une contrainte de clé étrangère stipule que les valeurs d'une colonne (ou d'un groupe de colonnes) doivent correspondre aux valeurs qui apparaissent dans les lignes d'une autre table. On dit que cela maintient l'intégrité référentielle entre les deux tables.

Soit la table de produits, déjà utilisée plusieurs fois :

CREATE TABLE produits (
        no_produit integer PRIMARY KEY,
        nom text,
        prix numeric
    );

Soit également une table qui stocke les commandes de ces produits. Il est intéressant de s'assurer que la table des commandes ne contient que des commandes de produits qui existent réellement. Pour cela, une contrainte de clé étrangère est définie dans la table des commandes qui référence la table produit :

CREATE TABLE commandes (
        id_commande integer PRIMARY KEY,
        no_produit integer REFERENCES produits (no_produit),
        quantite integer
    );

Il est désormais impossible de créer des commandes pour lesquelles no_produit n'apparaît pas dans la table produits.

Dans cette situation, on dit que la table des commandes est la table qui référence et la table des produits est la table référencée. De la même façon, il y a des colonnes qui référencent et des colonnes référencées.

La commande précédente peut être raccourcie en

CREATE TABLE commandes (
        id_commande integer PRIMARY KEY,
        no_produit integer REFERENCES produits,
        quantite integer
    );

parce qu'en l'absence de liste de colonnes, la clé primaire de la table de référence est utilisée comme colonne de référence.

Une clé étrangère peut aussi contraindre et référencer un groupe de colonnes. Comme cela a déjà été évoqué, il faut alors l'écrire sous forme d'une contrainte de table. Exemple de syntaxe :

CREATE TABLE t1 (
      a integer PRIMARY KEY,
      b integer,
      c integer,
      FOREIGN KEY (b, c) REFERENCES autre_table (c1, c2)
    );

Le nombre et le type des colonnes contraintes doivent correspondre au nombre et au type des colonnes référencées.

Une contrainte de clé étrangère peut être nommée de la façon habituelle.

Une table peut contenir plusieurs contraintes de clé étrangère. Les relation n-n entre tables sont implantées ainsi. Soient des tables qui contiennent des produits et des commandes, avec la possibilité d'autoriser une commande à contenir plusieurs produits (ce que la structure ci-dessus ne permet pas). On peut pour cela utiliser la structure de table suivante :

CREATE TABLE produits (
        no_produit integer PRIMARY KEY,
        nom text,
        prix numeric
    );

    CREATE TABLE commandes (
        id_commande integer PRIMARY KEY,
        adresse_de_livraison text,
        ...
    );

    CREATE TABLE commande_produits (
        no_produit integer REFERENCES produits,
        id_commande integer REFERENCES commandes,
        quantite integer,
        PRIMARY KEY (no_produit, id_commande)
    );

La clé primaire de la dernière table recouvre les clés étrangères.

Les clés étrangères interdisent désormais la création de commandes qui ne soient pas liées à un produit. Qu'arrive-t-il si un produit est supprimé alors qu'une commande y fait référence ? SQL permet aussi de le gérer. Intuitivement, plusieurs options existent :

  • interdire d'effacer un produit référencé ;

  • effacer aussi les commandes ;

  • autre chose ?

Pour illustrer ce cas, la politique suivante est implantée sur l'exemple de relations n-n évoqué plus haut :

  • quand quelqu'un veut retirer un produit qui est encore référencé par une commande (au travers de commande_produits), on l'interdit ;

  • si quelqu'un supprime une commande, les éléments de la commande sont aussi supprimés.

CREATE TABLE produits (
        no_produit integer PRIMARY KEY,
        nom text,
        prix numeric
    );

    CREATE TABLE commandes (
        id_commande integer PRIMARY KEY,
        adresse_de_livraison text,
        ...
    );

    CREATE TABLE commande_produits (
        no_produit integer REFERENCES produits ON DELETE RESTRICT,
        id_commande integer REFERENCES commandes ON DELETE CASCADE,
        quantite integer,
        PRIMARY KEY (no_produit, id_commande)
    );

Restreindre les suppressions et les cascader sont les deux options les plus communes. RESTRICT empêche la suppression d'une ligne référencée. NO ACTION impose la levée d'une erreur si des lignes référençant existent lors de la vérification de la contrainte. Il s'agit du comportement par défaut en l'absence de précision. La différence entre RESTRICT et NO ACTION est l'autorisation par NO ACTION du report de la vérification à la fin de la transaction, ce que RESTRICT ne permet pas. CASCADE indique que, lors de la suppression d'une ligne référencée, les lignes la référençant doivent être automatiquement supprimées. Il existe deux autres options : SET NULL et SET DEFAULT. Celles-ci imposent que les colonnes qui référencent soient réinitialisées à NULL ou à leur valeur par défaut, respectivement, lors de la suppression d'une ligne référencée. Elles ne dispensent pas pour autant d'observer les contraintes. Par exemple, si une action précise SET DEFAULT mais que la valeur par défaut ne satisfait pas la clé étrangère, l'opération échoue.

À l'instar de ON DELETE, existe ON UPDATE, évoqué lorsqu'une colonne référencée est modifiée (actualisée). Les actions possibles sont les mêmes.

Le Chapitre 6, Manipulation de données contient de plus amples informations sur l'actualisation et la suppression de données.

Une clé étrangère peut faire référence à des colonnes qui constituent une clé primaire ou forment une contrainte d'unicité. Si la clé étrangère référence une contrainte d'unicité, des possibilités supplémentaires sont offertes concernant la correspondance des valeurs NULL. Celles-ci sont expliquées dans la documentation de référence de CREATE TABLE.