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Documentation PostgreSQL 12.21 » Langage SQL » Définition des données » L'héritage

5.10. L'héritage

PostgreSQL implante l'héritage des tables, qui peut s'avérer très utile pour les concepteurs de bases de données. (SQL:1999 et les versions suivantes définissent une fonctionnalité d'héritage de type qui diffère par de nombreux aspects des fonctionnalités décrites ici.)

Soit l'exemple d'un modèle de données de villes. Chaque état comporte plusieurs villes, mais une seule capitale. Pour récupérer rapidement la ville capitale d'un état donné, on peut créer deux tables, une pour les capitales et une pour les villes qui ne sont pas des capitales. Mais, que se passe-t-il dans le cas où toutes les données d'une ville doivent être récupérées, qu'elle soit une capitale ou non ? L'héritage peut aider à résoudre ce problème. La table capitales est définie pour hériter de villes :

CREATE TABLE villes (
    nom             text,
    population      float,
    elevation        int     -- (en pied)
);

CREATE TABLE capitales (
    etat           char(2)
) INHERITS (villes);

Dans ce cas, la table capitales hérite de toutes les colonnes de sa table parente, villes. Les capitales ont aussi une colonne supplémentaire, etat, qui indique l'état dont elles sont capitales.

Dans PostgreSQL, une table peut hériter de zéro à plusieurs autres tables et une requête faire référence aux lignes d'une table ou à celles d'une table et de ses descendantes. Ce dernier comportement est celui par défaut.

Par exemple, la requête suivante retourne les noms et elevations de toutes les villes, y compris les capitales, situées à une élévation supérieure à 500 pieds :

SELECT nom, elevation
    FROM villes
    WHERE elevation > 500;

Avec les données du tutoriel de PostgreSQL (voir Section 2.1), ceci renvoie :

   nom     | elevation
-----------+-----------
 Las Vegas |      2174
 Mariposa  |      1953
 Madison   |       845

D'un autre côté, la requête suivante retourne les noms et elevations de toutes les villes, qui ne sont pas des capitales, situées à une élévation supérieure à 500 pieds :

SELECT nom, elevation
    FROM ONLY villes
    WHERE elevation > 500;

   nom     | elevation
-----------+-----------
 Las Vegas |      2174
 Mariposa  |      1953

Le mot-clé ONLY indique que la requête s'applique uniquement aux villes, et non pas à toutes les tables en dessous de villes dans la hiérarchie de l'héritage. Un grand nombre des commandes déjà évoquées -- SELECT, UPDATE et DELETE -- supportent le mot-clé ONLY.

Vous pouvez aussi écrire le nom de la table avec un astérisque (*) à la fin pour indiquer spécifiquement que les tables filles sont incluses :

SELECT name, elevation
    FROM cities*
    WHERE elevation > 500;

Écrire l'astérisque (*) n'est pas nécessaire, puisque ce comportement est toujours le comportement par défaut. Toutefois, cette syntaxe est toujours supportée pour raison de compatibilité avec les anciennes versions où le comportement par défaut pouvait être changé.

Dans certains cas, il peut être intéressant de savoir de quelle table provient une ligne donnée. Une colonne système appelée TABLEOID, présente dans chaque table, donne la table d'origine :

SELECT v.tableoid, v.nom, v.elevation
FROM villes v
WHERE v.elevation > 500;

qui renvoie :

 tableoid |   nom     | elevation
----------+-----------+-----------
   139793 | Las Vegas |      2174
   139793 | Mariposa  |      1953
   139798 | Madison   |       845

(Reproduire cet exemple conduit probablement à des OID numériques différents). Une jointure avec pg_class, permet d'obtenir les noms réels des tables :

SELECT p.relname, v.nom, v.elevation
FROM villes v, pg_class p
WHERE v.elevation > 500 AND v.tableoid = p.oid;

ce qui retourne :

 relname   |   nom     | elevation
-----------+-----------+-----------
 villes    | Las Vegas |      2174
 villes    | Mariposa  |      1953
 capitales | Madison   |       845

Une autre manière d'obtenir le même effet est d'utiliser le pseudo-type regclass qui affichera l'OID de la table de façon symbolique :

SELECT v.tableoid::regclass, v.nom, v.elevation
FROM villes v
WHERE v.elevation > 500;
       

L'héritage ne propage pas automatiquement les données des commandes INSERT ou COPY aux autres tables de la hiérarchie de l'héritage. Dans l'exemple considéré, l'instruction INSERT suivante échoue :

INSERT INTO villes (nom, population, elevation, etat)
VALUES ('Albany', NULL, NULL, 'NY');

On pourrait espérer que les données soient d'une manière ou d'une autre acheminées vers la table capitales, mais ce n'est pas le cas : INSERT insère toujours dans la table indiquée. Dans certains cas, il est possible de rediriger l'insertion en utilisant une règle (voir Chapitre 40). Néanmoins, cela n'est d'aucune aide dans le cas ci-dessus, car la table villes ne contient pas la colonne etat. La commande est donc rejetée avant que la règle ne puisse être appliquée.

Toutes les contraintes de vérification et toutes les contraintes NOT NULL sur une table parent sont automatiquement héritées par les tables enfants, sauf si elles sont spécifiées explicitement avec des clauses NO INHERIT. Les autres types de contraintes (unicité, clé primaire, clé étrangère) ne sont pas hérités.

Une table peut hériter de plusieurs tables, auquel cas elle possède l'union des colonnes définies par les tables mères. Toute colonne déclarée dans la définition de la table enfant est ajoutée à cette dernière. Si le même nom de colonne apparaît dans plusieurs tables mères, ou à la fois dans une table mère et dans la définition de la table enfant, alors ces colonnes sont « assemblées » pour qu'il n'en existe qu'une dans la table enfant. Pour être assemblées, les colonnes doivent avoir le même type de données, sinon une erreur est levée. Les contraintes de vérification et les contraintes non NULL héritables sont assemblées de façon similaire. De ce fait, par exemple, une colonne assemblée sera marquée non NULL si une des définitions de colonne d'où elle provient est marquée non NULL. Les contraintes de vérification sont assemblées si elles ont le même nom, et l'assemblage échouera si leurs conditions sont différentes.

L'héritage de table est établi à la création de la table enfant, à l'aide de la clause INHERITS de l'instruction CREATE TABLE. Alternativement, il est possible d'ajouter à une table, définie de façon compatible, une nouvelle relation de parenté à l'aide de la clause INHERIT de ALTER TABLE. Pour cela, la nouvelle table enfant doit déjà inclure des colonnes de mêmes nom et type que les colonnes de la table parent. Elle doit aussi contenir des contraintes de vérification de mêmes nom et expression que celles de la table parent.

De la même façon, un lien d'héritage peut être supprimé d'un enfant à l'aide de la variante NO INHERIT d'ALTER TABLE. Ajouter et supprimer dynamiquement des liens d'héritage de cette façon est utile quand cette relation d'héritage est utilisée pour le partitionnement des tables (voir Section 5.11).

Un moyen pratique de créer une table compatible en vue d'en faire ultérieurement une table enfant est d'utiliser la clause LIKE dans CREATE TABLE. Ceci crée une nouvelle table avec les mêmes colonnes que la table source. S'il existe des contraintes CHECK définies sur la table source, l'option INCLUDING CONSTRAINTS de LIKE doit être indiquée, car le nouvel enfant doit avoir des contraintes qui correspondent à celles du parent pour être considéré compatible.

Une table mère ne peut pas être supprimée tant qu'elle a des enfants. Pas plus que les colonnes ou les contraintes de vérification des tables enfants ne peuvent être supprimées ou modifiées si elles sont héritées. La suppression d'une table et de tous ses descendants peut être aisément obtenue en supprimant la table mère avec l'option CASCADE (voir Section 5.14).

ALTER TABLE propage toute modification dans les définitions des colonnes et contraintes de vérification à travers la hiérarchie d'héritage. Là encore, supprimer des colonnes qui dépendent d'autres tables mères n'est possible qu'avec l'option CASCADE. ALTER TABLE suit les mêmes règles d'assemblage de colonnes dupliquées et de rejet que l'instruction CREATE TABLE.

Les requêtes sur tables héritées réalisent des vérifications de droit sur la table parent seulement. De ce fait, par exemple, donner le droit UPDATE sur la table villes implique que les droits de mise à jour des lignes dans la table capitales soient elles aussi vérifiées quand elles sont accédées via la table villes. Ceci préserve l'apparence que les données proviennent (aussi) de la table parent. Mais la table capitales ne pouvait pas être mise à jour directement sans droit supplémentaire. Deux exceptions à cette règle sont TRUNCATE et LOCK TABLE, où les droits sur les tables filles sont toujours vérifiées qu'elles soient traitées directement ou par récursivité via les commandes réalisées sur la table parent.

De façon similaire, les politiques de sécurité au niveau ligne de la table parent (voir Section 5.8) sont appliquées aux lignes provenant des tables filles avec une requête héritée. Les politiques de tables enfant sont appliquées seulement quand la table enfant est explicitement nommée dans la requête. Dans ce cas, toute politique attachée à ses parents est ignorée.

Les tables distantes (voir Section 5.12) peuvent aussi participer aux hiérarchies d'héritage, soit comme table parent, soit comme table enfant, comme les tables standards peuvent l'être. Si une table distante fait partie d'une hiérarchie d'héritage, toutes les opérations non supportées par la table étrangère ne sont pas non plus supportées sur l'ensemble de la hiérarchie.

5.10.1. Restrictions

Notez que toutes les commandes SQL fonctionnent avec les héritages. Les commandes utilisées pour récupérer des données, pour modifier des données ou pour modifier le schéma (autrement dit SELECT, UPDATE, DELETE, la plupart des variantes de ALTER TABLE, mais pas INSERT ou ALTER TABLE ... RENAME) incluent par défaut les tables filles et supportent la notation ONLY pour les exclure. Les commandes qui font de la maintenance de bases de données et de la configuration (par exemple REINDEX, VACUUM) fonctionnent typiquement uniquement sur les tables physiques, individuelles et ne supportent pas la récursion sur les tables de l'héritage. Le comportement respectif de chaque commande individuelle est documenté dans la référence (Commandes SQL).

Il existe une réelle limitation à la fonctionnalité d'héritage : les index (dont les contraintes d'unicité) et les contraintes de clés étrangères ne s'appliquent qu'aux tables mères, pas à leurs héritiers. Cela est valable pour le côté référençant et le côté référencé d'une contrainte de clé étrangère. Ce qui donne, dans les termes de l'exemple ci-dessus :

  • si villes.nom est déclarée UNIQUE ou clé primaire (PRIMARY KEY), cela n'empêche pas la table capitales de posséder des lignes avec des noms dupliqués dans villes. Et ces lignes dupliquées s'affichent par défaut dans les requêtes sur villes. En fait, par défaut, capitales n'a pas de contrainte d'unicité du tout et, du coup, peut contenir plusieurs lignes avec le même nom. Une contrainte d'unicité peut être ajoutée à capitales, mais cela n'empêche pas la duplication avec villes ;

  • de façon similaire, si villes.nom fait référence (REFERENCES) à une autre table, cette contrainte n'est pas automatiquement propagée à capitales. Il est facile de contourner ce cas de figure en ajoutant manuellement la même contrainte REFERENCES à capitales ;

  • si une autre table indique REFERENCES villes(nom), cela l'autorise à contenir les noms des villes, mais pas les noms des capitales. Il n'existe pas de contournement efficace de ce cas.

Certaines fonctionnalité non implémentées pour l'héritage le sont pour le partitionnement déclaratif. Réfléchissez soigneusement avant de décider de l'utilité de l'ancien partitionnement par héritage pour votre application.